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Vieux 03/03/2008, 11h54
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La guerre de Pologne



"..........je me souviendrais toujours de cette guerre comme la plus meurtrière de mon temps". C'est en ces mots que Muran Arçuk concluait son Histoire de la 2e guerre de Pologne à laquelle il avait participé en temps qu'officier de l'armée ottomane. C'est le seul récit d'époque dont les historiens disposent aujourd'hui.

La découverte de cet ouvrage en 1912 dans le petit village de Kerliech, sur l'île grecque de Polyaiga, fut une petite révolution dans nos connaissances sur ces faits. Pendant longtemps, les historiens n'eurent à disposition que les récits impériaux ou la Chronique scandinave de Ulah Mortensen. Si ces sources sont précieuses pour aborder cette guerre, elles étaient malheureusement lacunaires et trop partisanes. L'oeuvre de Muran Arçuk, outre le fait d'apporter un regard neuf et surtout de l'autre camp sur cette guerre, participa grandement au débat qui animait une partie des historiens d'entre-deux-guerres.

La chute de l'Empire austro-hongrois avait entrainé l'ouverture publique des archives et permis à de nombreux historiens étrangers de les consulter (alors que jusqu'à maintenant, seuls les Autrichiens avaient le droit d'écrire l'histoire impériale). Ce que d'aucuns soupçonnaient depuis longtemps (comme Paul Lemerle dans Une autre histoire à découvrir en 1887) devint un sentiment commun de la communauté scientifique internationale après la découverte de ce livre et l'ouverture des archives autrichiennes. Les rares aveugles autrichiens qui continuèrent à défendre l'authenticité de la version autrichienne de l'histoire moderne furent littéralement noyés sous les flots de la production internationale qui réinterprétait, redécouvrait, remettait en cause bon nombres des acquis historiques d'alors.



Quels apports particuliers apporta le livre de Muran Arçuk pour la guerre de Pologne a proprement parlé ?

En résumé, il a permis 2 révisions fondamentales :
- l'origine de la guerre
- le déroulement de cette guerre

A la lecture des versions autrichiennes ou scandinaves, le lecteur en tirait le sentiment suivant : la vassalisation par la force de la Pologne était à l'origine de ce conflit, Autrichiens et Scandinaves étaient les libérateurs du peuple polonais, et l'issue de cette guerre (à savoir la libération de la Pologne) était la conséquence d'un rapport de force qui tournait progressivement à l'avantage des chrétiens.
Nous savons aujourd'hui que cela est totalement faux.

D'une part, si il est indiscutable que l'Empire Ottoman soumît par la force la royauté polonaise, il est également avéré que très vite le roi de Pologne s'accomoda de la situation. Le Sultan se montrait un suzerain peu exigeant et assez respectueux, surtout il était un indéfectible allié et protecteur. Quant on connait l'ogressité ( ) de la Russie à cette époque, on peut comprendre que ce dernier point devait être essentiel. Force est de constater qu'à l'époque, le monde chrétien de l'Ouest et même du Nord se fiche royalement de ce qui se passe en Lithuanie. Aussi, pour les Polonais, le Turc n'apparait plus tant comme un exécrable Infidéle qu'il faut convertir ou repousser. C'est le début d'un pragmatisme politique chez les élites polonaises. Et donc, imaginez la situation rocambolesque en 1538 quand Autrichiens et Scandinaves déclarent la guerre à l'Empire Ottoman sous prétexte de libérer la Pologne de sa servitude supposée.....et que la Pologne reste fidèle à son allié ottoman dans la guerre. Les armées impériales et scandinaves qui luttent contre les armées polonaises......pour libérer la Pologne

D'autre part, le déroulement que l'on pensait connaître était en fait totalement contraire à la réalité du terrain. Nous avons hélas été les victimes de la propagande impériale. Nous avons aujourd'hui des récits détaillés des plus importantes batailles de cette guerre et le constat est éloquant. Je vous laisse observer les estimations par vous même :



1er grande bataille en Ruthenia en juin 1539, 12000 impériaux contre 20000 polono-ottomans > 10000 morts du côté impérial, 5000 de l'autre.



La bataille de Ersekujvar en mars 1540 n'est pas une grande bataille mais elle a été retenu pour prouver que ce n'est pas la supériorité numérique qui est à l'origine des victoires ottomanes. Ici 7000 impériaux contre 8000 ottomans....seuls 2600 impériaux en survivront contre 6700 ottomans. Il y a 3 fois plus de pertes du côté impérial.


Voici ensuite la plus grande bataille de cette guerre qui se déroule en août 1540 en Transylvanie, elle est considéré comme la plus meurtrière de l'époque :

Une vaste offensive ottomane est lancée pour détruire l'armée impériale. 32000 hommes initialement ont attaqué les positions des 10000 impériaux. Mais cet écrasant avantage numérique ne dura que quelques heures, les renforts autrichiens étaient très proches.


Cette bataille qui dura 5 jours entiers (1 mois dans le jeu mais bon....ça fait pas réaliste lol) fut un triomphe pour les forces ottomanes qui préservérent jusqu'au bout leur supériorité numérique. Au final, 19000 impériaux se défendirent contre 32000 ottomans. Seuls 4500 purent s'enfuir du champs de bataille...soit autant que le nombre de morts du côté ottoman.


Tous ces faits d'armes, choisis parmi d'autres, montrent que contrairement aux mensonges impériaux, l'Empire Ottoman et la Pologne étaient en position de force incontestables. Les Scandinaves étaient incapables de pénétrer en terre polonaise, repoussés à chaque fois par les armées polonaises commandées par leur roi en personne. Les rares fois où ils défaillèrent, 8000 janissaires venèrent leur prêter main forte.
En Hongrie, les austro-hongrois essuyaient plus souvent des défaites que des victoires contre les Ottomans. Surtout, les victoires impériales se faisaient à l'arraché, au moral. Les victoires ottomanes faisaient, elles, des hécatombes dans les rangs adverses.

Tous ces éléments permirent de comprendre qu'en fait la libération finale de la Pologne de sa vassalité n'était nullement dû à la victoire pressentie des chrétiens. Elle était le fruit d'un accord diplomatique entre un autre roi chrétien, celui de Castille qui avait vassalisé un Etat musulman, et le Sultan. Ce dernier, pour obtenir l'indépendance du Maroc, accepta de délier de ses liens de vassal la royauté polonaise. Les Polonais ne vécurent certainement pas mal la chose puisqu'ils préservaient l'essentiel pour eux : leur alliance avec le Grand Turc.
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